Le lotus, fleur du symbolisme
Le lotus, symbole de la réalisation de l'être
La réalisation des possibilités de l'être est souvent symbolisée par l'épanouissement d'une fleur à la surface des "Eaux". Il s'agit des "Eaux primordiales" qui renferment, dans leur unité première et originelle, toutes les possibilités de réalisation. Cette fleur est habituellement un lotus en Orient, une rose ou un lis en Occident.
La fleur en général et le lotus en particulier sont des symboles de l'accomplissement spirituel de l'être, depuis les profondeurs obscures associées aux "Eaux inférieures" jusqu'à la floraison complète dans la pleine lumière des "Eaux supérieures". Cet accomplissement émane de la semence (germe premier ou Oeuf du Monde), s'ouvre sous la forme de bouton (éclosion de l'Oeuf) et s'épanouit à la pleine floraison.
La fleur incarne le principe féminin ou passif de la manifestation qui l'assimile à un réceptacle, une coupe, un vase recevant l'influence du principe masculin ou actif. Cette distinction entre principes passif et actif se retrouve dans les différentes formes traditionnelles: Prakriti/Purusha en Inde, yin/yang en Chine, féminin/masculin en Occident. De l'union de ces deux principes naissent la manifestation de l'être et de toutes ses possibilités de réalisation dans toute forme traditionnelle.
La fleur sacrée de l'Égypte
Le papyrus et le lotus, deux plantes aquatiques, représentaient respectivement les royaumes de la Haute et de la Basse Égypte. Selon le mythe égyptien de la création du monde, le lotus est sorti du limon originel et de son calice le divin Créateur. La fleur de lotus s'ouvrant au lever du soleil et se refermant à son coucher, symbolise le dieu du Soleil et l'expansion de la lumière hors du limon originel.
Lieu de naissance et couche nuptiale d'Isis et d'Osiris, il symbolise également la naissance et la re-naissance après la mort. Rien d'étonnant dès lors qu'il orne les colonnes des monuments de l'architecture égyptienne et de ses représentations murales. La colonne symbolise l'Axe de l'Univers d'où partent autant de faisceaux de lotus représentant le plein épanouissement de la manifestation du monde.
Le lotus bleu était davantage estimé que le lotus blanc en raison de l'odeur suave, semblable à celle de la vie divine, qu'il exhalait. Attribut de Néfertem, le dieu de Memphis et le "Seigneur des Parfums", il était appelé "nen-nufer", origine de la dénomination française "nénuphar".
Le lotus dans la tradition hindoue
Dans la tradition hindoue, Vishnu dort à la surface des "Eaux primordiales". Un lotus rose émerge de son nombril. Au milieu de la fleur se tient Brahmâ.
Le lotus rose ("padma") associé à Vishnu est un symbole diurne et solaire contrairement au lotus bleu ("utpala") propre à la nuit et à la lune et en relation avec Shiva.
Ces trois dieux représentent la triple manifestation ("Trimûrti"): Brahmâ le Créateur, Vishnu le Préservateur et Shiva le Destructeur ou plus exactement le Transformateur. La préservation se fait au grand jour tandis que la transformation opère nuitamment.
Chacun de ces dieux représentent des principes producteurs du monde manifesté et autant de facettes du dieu Suprême, Brahma. En tant que "Principe Suprême", Brahma est au-delà de toute distinction entre création, préservation et transformation. Il est neutre alors que Brahmâ, Vishnu et Shiva sont masculins et dotés d'énergies féminines propres ("shakti") dépeintes respectivement par les trois déesses: Sarasvatî, Lakshmî et Pârvatî.
Lakshmî, "shakti" de Vishnu et déesse du lotus, apparaît debout ou assise sur un lotus, élevant des lotus dans ses mains et entourée de fleurs en boutons ou en corolles. Des perles de pluie tombent de ses mains. Elles symbolisent la descente des "Eaux supérieures" vers les "Eaux inférieures" à la source de la création. Cet aspect est encore davantage souligné sur certaines représentations où des éléphants apparaissent de chaque côté, déversant de l'eau de leurs trompes.
Le Sûtra du Lotus
Dans nombre de représentations, le Bouddha se tient au milieu d'un lotus à huit pétales. Il est assis sur le moyeu immobile d'une roue à huit rayons qui symbolisent les huit points cardinaux et intermédiaires représentatifs de la manifestation dans toute sa plénitude. Une roue qui évoque les représentations stylisées du lotus ou de la "rouelle celtique", symboles de la manifestation du monde (circonférence) unie à son Principe immobile (centre).
Le maître qui a introduit la doctrine du Bouddha au Tibet au VIIIe siècle de notre ère porte le nom de "Padmasambhava" (celui qui naquit du lotus).
Le "Sûtra du Lotus" (Lotus de la Loi Véritable) constitue un recueil sanskrit reconnu par le Mahayana comme renfermant les enseignements fondamentaux du Bouddha. À la fois enseignement du Bouddha vivant et enseignement vivant du Bouddha, il expose les nombreuses voies qui mènent à l'Éveil et tout particulièrement: le rôle du Bouddha; les bénéfices retirés des Bodhisattvas; le sens de la nature du Bouddha et l'importance de la foi.
Le lotus, qui pousse dans la boue et la vase pour donner une fleur d'une exquise beauté, dépeint la nature du Bouddha depuis son émanation jusqu'à sa sublime fragrance.
Les voies du Tantra et du Kundalini-Yoga
Selon le Tantra, il y a dans l'être humain un corps subtil parcouru par trois canaux ("nâdis") joints à leur base. Les canaux latéraux, où s'écoulent des énergies opposées, solaire ("Pingala") et lunaire ("Ida"), s'enroulent autour du troisième canal neutre ("Sushumnâ") et de cinq points fondamentaux.
Au nombre total de sept, ces points fondamentaux sont qualifiés de chakras, terme sanskrit qui se traduit littéralement par roues. Assortie de rayons, la roue représente la forme stylisée du lotus. Or, ces centres sont précisément représentés, dans la tradition hindoue, par des lotus distingués par le nombre de leurs pétales.
Au cours de son ascension, la "kundalini", forme statique de l'énergie subtile, traverse successivement les différents chakras associés aux besoins physiques, psychiques et spirituels pour mener l'être vers la Connaissance véritable et à la pleine Réalisation symbolisées par le lotus à mille pétales.
Dans le Tantra taoïste, la floraison est le résultat d'une alchimie intérieure, du mariage de l'essence (hsin) avec le souffle (ki), du Feu (Li) et de l'Eau (Kan) qui symbolise le retour au centre, à l'unité de l'état primordial représentée par le lotus.