Les sociétés secrètes
Les sociétés secrètes existent depuis l'aube de l'humanité. L'Histoire est marquée par leur existence. La version officielle de l'histoire, dite exotérique, évoque peu les sociétés secrètes qui demeurent dans l'ombre, et occulte les raisons et la portée de leurs interventions.
Parallèlement à l'histoire officielle s'est constamment renouvelée une histoire ésotérique à laquelle il faut ici s'intéresser. Les plus anciens documents que nous avons retrouvés concernant les sociétés secrètes (Sumer, Egypte, Grèce) montrent qu'elles ont été jadis profondément liées à la Magie. Certains évoquent des origines douteuses, la venue d'extraterrestres ou l'existence de continents perdus : sur ces origines, il n'existe aucune preuve .
Plusieurs grandes traditions secrètes sont liées à l'édification des grands monuments de l'Antiquité, pour laquelle il fallait avoir des connaissances hors du commun, gardées secrètes. De la construction du Temple de Salomon à Jérusalem par exemple, sont issus aussi bien des ordres ésotériques juifs, que le compagnonnage ou la symbolique de la Franc-Maçonnerie actuelle.
Les sociétés secrètes liées aux mythes méditerranéens (Mystères d'Isis, d'Eleusis, d'Epidaure, oracles de Delphes) ont fourni nombre d'éléments constitutifs de l'imaginaire occidental et nourri en secret des adeptes discrets.
Il faut objectivement noter que d'éminents penseurs grecs (Euclide, Pythagore, Aristote) avaient été initiés aux mystères.
De nos jours, l'expression consacrée par le grand public "sociétés secrètes" renvoie à des réalités sociales bien différentes les unes des autres, ce qui entraîne facilement amalgames et confusions.
La plupart des sociétés ésotériques n'offrent pas un exposé systématique de leur doctrine, mais proposent plutôt une série de données sur les "Grands Mystères". Ces sociétés de "mystère" ne s'éteignent pas rapidement, comme certaines sociétés secrètes de nature politique qui disparaissent avec les causes qui ont suscité leur apparition.
Elles existent depuis les temps archaïques, et sont liées à des rites primitifs, mais toujours vivaces, de mort et de résurrection, les sujets métaphysiques qui touchent le plus les hommes . Elles traduisent leurs mystères par des rites et des symboles, et exercent une influence qui serait autrement "incommunicable" aux profanes, à partir desquelles le postulant doit trouver les significations cachées par la réflexion et la méditation, dans une sorte de démarche intuitive limitant le raisonnement .
Le néophyte doit donc effectuer un travail intérieur sur lui-même pour reconstruire personnellement une philosophie qui reste à la fois identique à elle-même à travers les époques, tout en offrant à chaque époque des réponses aux interrogations du moment.
Le rôle des membres de la secte consiste à proposer des éléments de connaissance, à susciter le travail intérieur et l'émulation psychique. Dans cette perspective, l'ancienneté des traditions du groupe a son importance, par le poids que cet héritage culturel représente. Ce travail sur soi rendu possible par la présence de la secte constitue l'essentiel de l'initiation.
Occultistes ou autres, les sociétés secrètes prétendent organiser dans l'ombre les mutations sociales à venir. Elles déplorent les courants populaires liés au spiritisme, à la magie noire, à la démonologie, protestant qu'on laisse le grand public jouer avec les "sciences sacrées" du passé : la "science" du tarot, le magnétisme, l'astrologie.
À côté de ces "sociétés des mystères" existent d'autres sociétés que l'on appelle, faute de mieux, les "sociétés du secret", et qui ont des visées plus profanes dans leur pratique du prosélytisme.
Les "sociétés du secret".
Le flou qui entoure ces nombreuses sectes est commode , mais on sait qu'elles sont très différentes les unes des autres. Leurs caractéristiques communes se trouvent dans le grand rôle dévolu au gourou; dans la soumission des adhérents qui ne peuvent plus agir librement, placés sous le contrôle de la secte sur ses membres, et dans la confusion concernant les buts poursuivis.
L'importance du gourou.
L'adepte d'une secte est quelqu'un qui se lie affectivement à un gourou, épouse sa doctrine et, sous son influence, se coupe progressivement du monde.
Le gourou met en place une organisation minutieuse, conduisant à la régression, à la dilution de la responsabilité de l'individu : "J'avais un plan, une liste des restaurants, l'adresse des cinémas et du centre commercial. Tout avait été prévu en fait."
Certaines sectes plus secrètes que d'autres fonctionnent avec une stricte hiérarchisation des pouvoirs, et elles utilisent une structure pyramidale comme garantie du secret.
Ou encore, comme cela semble être le cas de la Trans, une structure "en étoile" qui aboutit au même résultat : le subordonné ne reçoit ses informations que d'un supérieur. Le réseau ne fonctionne que dans deux sens : du subordonné vers le supérieur, du supérieur vers le subordonné.
La séduction.
La mise sous dépendance commence par les manoeuvres de contact qui utilisent avant tout les sentiments. Pas de démonstrations ou de raisonnements : il s'agit d'émouvoir le futur adepte, de le bouleverser.
La secte cherche à couper l'adepte de son monde antérieur, par une organisation de sa vie minutieuse qui le conduit à la perte de contact et à la régression sociale : "Le disciple d'une secte emprunte une voie qui fera de lui un adepte, quelqu'un qui a atteint le but (du latin adeptus, ayant, atteint). Il suit un maître; mais en même temps il se coupe du reste de la communauté humaine et devient un sectateur isolé."
Le conditionnement.
L'objectif poursuivi est de modifier le comportement d'un individu pour l'amener à adopter des conduites qu'il n'avait pas auparavant. Le conditionnement peut être verbal, par explications et encouragements. L'endoctrinement se fait alors en douceur, par un remodelage patient de la pensée, ce que fait en partie l'éducation courante.
Mais d'autres techniques sont coercitives. Elles font partie de ce viol mental qu'est le lavage de cerveaux (brain-washing), complété éventuellement par un contrôle mental (mind control).
Ces méthodes ont été mises au point après 1950, après les lavages de cerveau subis par plusieurs milliers de prisonniers américains par les Coréens du Nord, lors de la guerre de Corée. Sous la direction de la C.I.A., près de 200 chercheurs travaillant dans les universités reçurent alors des crédits pour faire des recherches , dans le cadre d'un programme non communiqué aux cobayes sur la mise au point de "techniques défensives et offensives de renseignements".
Le contrôle.
Sont mis en place des systèmes qui entraînent la dépendance, et l'assuétude envers la secte. Le néophyte, maintenu sous contrainte, se trouve dans l'impossibilité de se soustraire à un modèle dont il ne connaît que les aspects le concernant. La coercition s'exerce sur l'adepte, mais aussi sur les intermédiaires. Dans la quasi-totalité des sectes, les buts cachés vont à l'encontre de ceux qui sont annoncés ou affichés.
Roland Ernould