Mademoiselle,

Vous avez le charme sûr des corbeaux morbides : robe noire et aile rasant la rocaille, oeil de glace et cœur percé. Une chose affreuse pour le commun, un doux présage pour l'esthète. Je suis de vos rares prétendants Mademoiselle. Ce qu'il y a en vous de sinistre plaît à mon cœur.

J'ai toujours préféré les gargouilles aux anges. Votre front est une rosace d'ombres et de plomb, votre regard le reflet triste et beau de votre âme triste et belle, et votre cœur une cloche qui bat. Sourde et muette.

Vous êtes légère comme une tombe, belle ainsi qu'un chant sépulcral, émouvante telle une trépassée. J'embrasse la pierre sur laquelle je bâtirai mon empire de sable et de fumée.

Vous êtes désolée mais glorieuse, pareille à un champ de ruine après la bataille : votre cœur blessé m'agrée singulièrement, votre visage d'affamée m'est aimable, votre voix qui prononce mon nom m'est un chant d'espérance mélancolique et serein.

Vous êtes une brume épaisse, et je suis un vent fou.

Texte : Raphaël Zacharie de Izarra