Eve dans le Jardin
« L’Adam Un et multiple de l’origine « conçu » par Dieu entièrement libre et doué de pouvoirs démiurgiques décide de se séparer de sa part féminine qui lui est consubstantielle, mais pas assez soumise à son gré. Il invente la Femme pour la dominer. Ce faisant il se vide de sa substance et s’effondre. C’est la « Chute », la vraie, dans la « adama » contre laquelle Dieu l’a mis en garde.
La Femme, devenue autonome, invente l’amour pour ne pas se venger et abandonner le malheureux à son triste sort.
D’autant qu’au cours de leur bref contact, il a su toucher, quoique endormie, son cœur et ses sens. Bravant l’interdit divin concernant l’Arbre de l’Omniscience, elle en mange et associe son compagnon expirant à sa transgression délibérée mais mineure au regard de celle de l’Adam désormais déchu à commise. Dans un dernier sursaut il l’appelle la « vivante ». La vivante intégrale. « Car elle sera la mère de tous les vivants » mortels que nous sommes dans la condition humaine, lui passant ainsi le flambeau de l’avenir de l’humanité qui grâce à elle et par le détour des générations, retrouvera peut-être l’intégrité et l’immortalité de son origine, comme Dieu le lui laisse espérer, en condamnant l’Adam seul à l’exclusion de la Femme, qui n’est pas chassée de l’Eden, où l’attend l’Arbre de Vie.
Ainsi, le récit biblique du mythe de l’Eden, loin de stigmatiser la Femme comme pécheresse et responsable de la perte de l’Humanité, la glorifie comme son recours possible contre la mort définitive, où l’a précipitée la « chute » catastrophique de l’Adam dans la « adama » ».
Paul Nothomb