La femme et la sorcière des contes et légendes populaires
La femme et la sorcière des contes et légendes populaires
le roi de la montagne d'or, un jeune chaman accepte son initiation (il sera décapité puis ressuscité) pour sauver une princesse. Il épouse la princesse et devient le roi de la montagne d'or. Il désire retourner voir son père, et sa femme accepte de l'aider à condition qu'il ne cherche jamais à faire quitter la montagne d'or ni à elle, ni à leur enfant. Bien entendu, il oubliera sa promesse et exigera de sa femme qu'elle le rejoigne chez son père. Elle dissimulera d'abord sa colère, mais profitera de son sommeil pour le laisser en piètre état près de chez son père, sans moyen de rejoindre la montagne d'or. Il décide alors de lutter contre le sort, et repart à la conquête de son royaume. Il va tromper trois géants (sans les tuer) et acquérir ainsi suffisamment de magie pour retourner dans son royaume. Là, il retrouve sa femme infidèle célébrant son mariage avec un nouvel homme. Il se rend invisible et se place derrière sa femme. Durant le banquet, il va manger et boire tout ce qui est servi à sa femme, ce qui la rend faible et honteuse; elle s'en va pleurer dans sa chambre. Il la rejoint et lui reproche son infidélité. Ensuite, il retourne dans la salle du banquet où les invités ne veulent pas le reconnaître. Il tue tout le monde et redevient le maître de la montagne d'or. Le conte ne dit rien du sort de la reine, mais il est clair qu'elle n'est pas tuée, et donc qu'elle va rester sa femme, et la reine. Dans ce conte, le pouvoir féminin se permet de rejeter le pouvoir masculin, mais "l'opiniâtreté masculine vaincra la rigueur féminine". Le fait que la légitimité vienne de la femme n'est néanmoins pas contesté. Le héros aurait très bien pu tuer l'infidèle et se proclamer roi. Il ne peut le faire parce que seul le fait qu'il ait épousé la propriétaire du pouvoir le rend maître légitime de la montagne d'or. Ce conte montre bien un état où le pouvoir féminin est menacé, mais non totalement détruit encore.
les souliers réduits en pièces, illustre en même temps une montée du pouvoir masculin qui va interdire les pratiques magiques aux femmes. Les douze filles du roi vont danser chaque nuit et abîment leurs souliers bien que leur père ferme la porte de leur chambre à clé. Un pauvre soldat va résoudre l'énigme. Il réussit à lutter contre le charme que les princesses utilisent pour endormir leurs surveillants, et il les suit dans leur voyage vers un monde souterrain. Le conte décrit un monde réel, mais on ne peut s'empêcher de penser à un voyage chamanique dans le monde d'en bas. Là, les princesses dansent toute la nuit, et c'est pourquoi leurs souliers sont usés le matin. Le secret étant découvert, il ne sera plus possible ensuite aux princesses de pratiquer leur art. Ce conte illustre parfaitement le fait que, après avoir été mystifié pendant longtemps, le pouvoir masculin finalement réussit à interdire le voyage chamanique aux femmes.
Les contes de Grimm, qui contiennent bien sûr bon nombre d'affreuses sorcières, décrivent aussi le pouvoir féminin sous un jour moins négatif. Par exemple, Grethel est une petite sorcière gentille qui tue la méchante vieille et qui est capable de sortir son frère du monde des esprits en l'aidant à franchir la rivière qui sépare les deux mondes.
les douze frères, leur petite soeur provoque par erreur leur transformation en douze corneilles. Elle rencontre une vieille sorcière qui va l'initier et lui permettre de rendre à ses frères leur forme humaine. Cette initiation comporte l'épreuve de rester sept ans sans parler et sans rire. Elle subira finalement l'épreuve du feu, dont elle sortira vivante grâce à ses douze frères. C'est bien une initiation chamanique, mais l'initiée n'utilise son pouvoir que pour aider les autres, en l'occurrence ses frères.