La Lycanthropie
J'ai vu Moeris se faire loup et s'enfoncer dans les bois.
Au moyen âge, on vit les lycanthropes, devenus loups garous, jeter l'épouvante dans les villes et dans les campagnes.
Les sorciers opéraient cette métamorphose sur leurs ennemis, mais le plus souvent, ils opéraient cette métamorphose sur eux mêmes, et sous cette forme nouvelle ils attaquaient, non seulement les troupeaux, mais encore les hommes, dont ils dévoraient la chair saignante ; ils pouvaient toujours, quand ils le voulaient, reprendre leur première forme, mais quand, par hasard, ils avaient reçu en se trouvant à l'état de loup, une blessure qui les avait privés d'un membre, ils gardaient, en redevenant hommes, l'empreinte de cette mutilation, et c'est par là que l'on parvenait souvent à les reconnaître.
L'un des démonologues les plus connus, Boguet, raconte que, dans les montagnes de l'auvergne, un chasseur fut un jour attaqué par un loup énorme, auquel, en se défendant, il coupa les patte droite. L'animal ainsi mutilé s'enfuit en boitant sur trois pattes, et le chasseur se rendit dans un château voisin pour demander l'hospitalité au gentilhomme qui l'habitait ; celui ci, en l'apercevant, s'enquit s'il avait fait bonne chasse.
Pour répondre à cette question, il voulut tirer de sa gibecière la patte qu'il venait de couper au loup qui l'avait attqué, mais quelle ne fut pas sa surprise, en trouvant au lieu d'une patte , une main et à l'un des doigts un anneau que le gentilhomme reconnût pour être celui de sa femme.
Il se rendit immédiatement auprès d'elle, et la trouva blessée et cachant son avant bras droit. Ce bras n'avait plus de main, on y rajusta celle que le chasseur avait rapportée, et force fut à cette malheureuse d'avouer que c'etait bien elle qui sous la forme d'un loup avait attaquée le chasseur. Le gentilhomme qui ne se souciait pas de garder une telle compagne la livra à la justice, et elle fut brûlée ...
Selon Collin de Plancy dans son dictionnaire infernal, les loups garous étaient fort communs dans le poitou ; on les y appelait la bête bigourne qui court la galipode.
Quand les bonnes gens entendent, dans les rues, les hurlements épouvantables du loup garou, ce qui n'arrive qu'au milieu de la nuit, ils se gardent bien de mettre la tête à la fenêtre, parce que s'ils avaient cette témérité, ils ne manqueraient pas d'avoir le cou tordu.
On assure dans cette province qu'on peut forcer le loup garou à quitter sa forme d'emprunt, en lui donnant un coup de fourche entre les deux yeux.
Delancre assure qu'ils étranglent les chiens et les enfants ; qu'ils mangent de bon appétit ; qu'ils marchent à quatre pattes, et qu'ils hurlent comme de vrais loups, avec de grandes gueules, des yeux étincelants et des dents crochues.
Bodin raconte qu'on vit en 1542, 150 loups garous sur une place publique à Constantinople.