la médiumité d'Allan Kardec
Le phénomène de la médiumnité est compliqué ; il exige certaines explications. Tous ceux qui ont quelque peu étudié les sciences occultes savent que l'homme est pourvu d'un organisme fluidique invisible, enveloppe inséparable de l'âme et qui progresse, s'affine et s'épure avec elle. Le corps physique, avec ses cinq sens, n'en est que la représentation grossière, le prolongement sur le plan matériel. Les sens psychiques, étouffés sous la chair chez la plupart des humains, recouvrent dans le sommeil et après la mort une partie de leurs moyens d'action et de perception.
Cette enveloppe subtile est en réalité notre véritable forme indestructible, antérieure à la naissance comme elle est survivante à la mort. Elle est le siège permanent des facultés de l'esprit, tandis que le corps matériel n'est qu'un vêtement d'emprunt. Cette forme, étant élastique et compressible, explique le phénomène de la croissance par son action sur le corps de l'enfant qu'elle développe jusqu'à ce qu'il soit parvenu à sa grandeur normale.
La médiumnité est donc le pouvoir que possèdent certains êtres, d'extérioriser ces sens profonds de l'âme qui, chez la plupart d'entre nous, restent inactifs et voilés durant la vie terrestre ; c'est le moyen de pénétrer par anticipation dans le monde des Esprits.
En bien des cas ce ne sont pas les Esprits qui viennent au médium, mais c'est lui qui va vers eux. La célèbre voyante de Prévorst se plaignait un jour que les Esprits s'immisçaient trop souvent dans sa vie intime. Et ceux-ci de lui répondre : " Ce n'est pas nous qui venons chez toi ; c'est toi qui viens chez nous. "
La médiumnité est donc par excellence révélatrice des puissances de l'âme ; elle est aussi un aperçu de nos modes de vie et de perception dans l'au-delà. A ces points de vue elle présente un double intérêt.
La part du médium dans beaucoup de phénomènes est grande et l'on ne peut méconnaître que généralement sa personnalité y joue un certain rôle. Mais, à mesure que ses facultés se développent, il devient plus conscient de la part qui doit lui être attribuée et de celle qui revient aux Esprits, surtout dans les phénomènes de l'écriture.
Chez les médiums en voie de formation, le cerveau est comparable à un clavier incomplet, ou plutôt à une plaque photographique inégalement sensibilisée, et qui enregistre d'une manière imparfaite les images et les pensées qu'elle doit reproduire. La pensée de l'Esprit n'est représentée que par des tronçons de phrases et des fragments d'idées. La nécessité s'impose donc pour celui-ci de combler les lacunes au moyen de termes et d'images empruntés aux habitudes du sujet.
Dans beaucoup de phénomènes, disions-nous, on retrouve une part attribuable au médium, à son propre fonds d'idées, de connaissances, d'expressions. En effet, penser et s'exprimer à l'aide de son cerveau ou bien par l'intermédiaire d'un cerveau étranger sont choses très différentes. Notre organe cérébral est adapté par un long et constant entraînement à notre mentalité personnelle et révèle un des aspects de notre moi. Il n'en est pas de même d'un cerveau étranger, et l'on doit comprendre les difficultés qu'éprouvent certains Esprits à se communiquer par des procédés aussi nets et précis que ceux dont ils disposaient sur la terre.
Cette difficulté, qui est très accusée dans les faits d'écriture, se retrouve à un degré moindre dans les phénomènes d'incorporation.
Ainsi, notre guide, qui jouit cependant d'une volonté et d'une force psychique exceptionnelles, et qui sait prendre pleine possession des sujets qu'il emploie, s'est servi quelquefois de termes plaisants qui ne lui étaient pas familiers et qu'il puisait dans le vocabulaire du médium.